L’AFTER SHOW
Duo Show with Louise Porte at Kommet ART SPACE, Lyon , France2021
📷Installation View - “l’After Show” - @Kommet Art Space - Lyon - 2021
L’After Show - Duo show avec Louise Porte à Kommet Art Space en mai 2021. en collaboration avec le Centre Wallonie Bruxelles.
L’after show met en présence la réalité d’une absence : l’instant est passé mais on se le représente au travers d’éléments abandonnés. Ce ne sont pas les détails de cet hypothétique évènement qui sont l’objet du désir, mais bien la représentation illusoire de ce désir. Ici, le fantasme surgit via le manque – ce que l’on imagine avoir raté. Louise Porte et Harold Lechien ont, en quelque sorte, statufié ce moment, donnant ainsi de multiples interprétations pour le spectateur. Le doute plane, est-ce un regard tourné vers le passé, le présent ou encore une réflexion portée sur le monde d’après ? Dans cette exposition, les artistes nous incitent à nous immerger dans l’absurde aussi bien que dans la frustration d’avoir, peut-être, manqué le show de l’année.
Texte : Emilie d’Ornano - Kommet Art Space
Texte de Marion Zilio
Histoire des oiseaux dans les ruines de l’After Show, exposition de Louise Porte et Harold Lechien, Kommet – Lieu d’art contemporain, Lyon.
Ce jour-là, en France, les Musées et les lieux de culture rouvraient leurs portes, libérant enfin les œuvres de la dormance dans laquelle elles semblaient végéter depuis des mois. L’After Show est l’évocation trouble d’un monde d’avant hantant un monde d’après, une boucle qui redistribue la linéarité du temps, plutôt qu’elle ne la fige, entre préservation et décadence, cristallisation et épuisement. Exposition fantôme, s’il en est, la scène paraît pétrifiée comme ensevelie par une coulée de lave, ou fixée par le décor artificiel d’un studio photo dont le fond vert — typique des effets spéciaux — aurait perdu de son éclat, cramé par un soleil aveuglant. L’After Show est un arrêt sur image, l’émergence d’un post-contemporain, qui pose le cadre d’un événement frappé par la soudaineté. Une reconstitution maladroite et générique, une maquette nostalgique ; un ça-a-été ? Ici tout semble suspendu, déjà-vu ou en attente. De qui, de quoi ? La rumeur tente de percer le souvenir de cette fossilisation.
Sur la chair de pierre, les muscles ferment, les épaules larges, des piques anti-pigeon. Le corps robuste et viril, d’une époque héroïque, laisse pourtant apparaître les traces de sa fragile condition. Sous ses airs de guerrier, de faucheur ou d’ouvrier, la plainte lancinante se fait entendre, et la fêlure qui lézarde son dos augure le déclin d’un empire. Engoncé dans un panneau lumineux, il signale les valeurs d’un temps où la publicité et la promotion des corps aspiraient toutes les velléités. Sur ses épaules, fichus entre les piques, des rubans argentés nourrissent le souvenir passé d’un moment qui fut sans doute heureux et inconséquent. Au loin, le rythme grisant de basses fait sourdre une pulsation, dont l’écho hante la pièce, la peuple par défaut. Deux mondes s’entrechoquent : d’un côté, un univers design composé de tables, de chaises hautes, de bouteilles et de coupes de champagne convoque un environnement standardisé, impersonnel et corporate, où la fête et l’événement trahissent notre impossible tranquillité, le devoir d’être-là, de ne rien manquer. La FOMO guette, et l’anxiété d’être déconnecté de la vie mondaine ressasse l’impérieuse injonction d’être visible pour exister. Tout à la fois friable et solidifié par du sable, Harold Lechien pulvérise de sa texture granuleuse les codes du display événementiel. D’un autre, le rire silencieux, l’œil hagard et la pose lascive de drôles d’oiseaux nous remémorent l’existence d’une expressivité nonchalante. Dans cet amas de déchets, de traces de vies passées, de mégots et de canettes abandonnées, d’autres qu’humains reprennent malicieusement leurs droits. Espiègles et badins, les oiseaux en terre noire de Louise Porte se prélassent dans la joyeuseté d’une paresse indocile et rétive.
L’atmosphère y est légère et embuée, comme un lendemain de gueule de bois, happée par des relents de tabac froid et la tentation de poursuivre l’ivresse. Alors que le soleil se lève ou que la nuit ne tombe, les angles s’arrondissent, les repères s’évanouissent. Dans cet entre-deux clandestin, la parole est action. Le geste, chargé de sens. Il n’y est plus question de discussions sophistiquées, d’avenir à anticiper, mais d’une dépense sans finalité ni projet, dans un présent partagé.
Ce jour-là, en France, les Musées et les lieux de culture rouvraient leurs portes, libérant enfin les œuvres de la dormance dans laquelle elles semblaient végéter depuis des mois. L’After Show est l’évocation trouble d’un monde d’avant hantant un monde d’après, une boucle qui redistribue la linéarité du temps, plutôt qu’elle ne la fige, entre préservation et décadence, cristallisation et épuisement. Exposition fantôme, s’il en est, la scène paraît pétrifiée comme ensevelie par une coulée de lave, ou fixée par le décor artificiel d’un studio photo dont le fond vert — typique des effets spéciaux — aurait perdu de son éclat, cramé par un soleil aveuglant. L’After Show est un arrêt sur image, l’émergence d’un post-contemporain, qui pose le cadre d’un événement frappé par la soudaineté. Une reconstitution maladroite et générique, une maquette nostalgique ; un ça-a-été ? Ici tout semble suspendu, déjà-vu ou en attente. De qui, de quoi ? La rumeur tente de percer le souvenir de cette fossilisation.
Sur la chair de pierre, les muscles ferment, les épaules larges, des piques anti-pigeon. Le corps robuste et viril, d’une époque héroïque, laisse pourtant apparaître les traces de sa fragile condition. Sous ses airs de guerrier, de faucheur ou d’ouvrier, la plainte lancinante se fait entendre, et la fêlure qui lézarde son dos augure le déclin d’un empire. Engoncé dans un panneau lumineux, il signale les valeurs d’un temps où la publicité et la promotion des corps aspiraient toutes les velléités. Sur ses épaules, fichus entre les piques, des rubans argentés nourrissent le souvenir passé d’un moment qui fut sans doute heureux et inconséquent. Au loin, le rythme grisant de basses fait sourdre une pulsation, dont l’écho hante la pièce, la peuple par défaut. Deux mondes s’entrechoquent : d’un côté, un univers design composé de tables, de chaises hautes, de bouteilles et de coupes de champagne convoque un environnement standardisé, impersonnel et corporate, où la fête et l’événement trahissent notre impossible tranquillité, le devoir d’être-là, de ne rien manquer. La FOMO guette, et l’anxiété d’être déconnecté de la vie mondaine ressasse l’impérieuse injonction d’être visible pour exister. Tout à la fois friable et solidifié par du sable, Harold Lechien pulvérise de sa texture granuleuse les codes du display événementiel. D’un autre, le rire silencieux, l’œil hagard et la pose lascive de drôles d’oiseaux nous remémorent l’existence d’une expressivité nonchalante. Dans cet amas de déchets, de traces de vies passées, de mégots et de canettes abandonnées, d’autres qu’humains reprennent malicieusement leurs droits. Espiègles et badins, les oiseaux en terre noire de Louise Porte se prélassent dans la joyeuseté d’une paresse indocile et rétive.
L’atmosphère y est légère et embuée, comme un lendemain de gueule de bois, happée par des relents de tabac froid et la tentation de poursuivre l’ivresse. Alors que le soleil se lève ou que la nuit ne tombe, les angles s’arrondissent, les repères s’évanouissent. Dans cet entre-deux clandestin, la parole est action. Le geste, chargé de sens. Il n’y est plus question de discussions sophistiquées, d’avenir à anticiper, mais d’une dépense sans finalité ni projet, dans un présent partagé.